Pour ceux qui ne le savent pas encore, l’Ukraine vit actuellement une crise profonde qui dépasse les simples politiques internes. Cette crise d’une rare violence s’inscrit dans un contexte de politique internationale qui dépasse les dissensions nationales.
Tout a commencé le 21 novembre 2013 date à laquelle l’ancien Président Viktor Ianoukovitch a rejeté l’accord d’association proposé par l’Union Européenne. Il réitèrera sa décision une semaine plus tard au sommet de l’UE à Vilnius. Entre temps, l’opposante Ioulia Timochenko a lancé un appel à la manifestation en suggérant à la population de descendre dans les rues. Cette décision du 21 novembre suivie de la volonté du Président de se rapprocher de la Russie affirmée quelques semaines plus tard a plongé le pays dans des troubles sans précédents. Trois mois après le début des manifestations pro-européennes, on compte des centaines de blessés et d’interpellations ainsi que des morts. La récente démission du gouvernement n’a pas semblé calmer l’ampleur du mouvement. Mais pourquoi?
Les événements internationaux de l’année 2013 ont montré toute l’essence de la rivalité actuelle entre la Russie et le monde occidental. Le Président russe Vladimir Poutine a affiché une politique neutre, consensuelle voire même pacifiste mais il n’en a pas moins conservé sa fermeté et sa rigueur à l’égard de ceux qui souhaitent étendre leur influence sur sa « chasse gardée ». L’Ukraine, nation cosaque et berceau de la civilisation slave, présente une histoire et des intérêts communs avec l’ancien pays des tsars. Un lien spirituel et religieux unit les deux pays autour d’une même cause, la cause slave. En outre, l’Ukraine représente un partenaire économique sérieux et un atout géopolitique important. La présence de la flotte militaire russe dans le port de Sébastopol en est la meilleure preuve.
Ces manifestations pro-occidentales se heurtent depuis plusieurs mois à cette alliance et l’acharnement des manifestants ne fait que révéler un peu plus chaque jour la volonté géopolitique de l’UE d’accueillir l’Ukraine en son sein. L’UE fait fi de l’apport économique de la Russie dans la vie des ukrainiens et ne se préoccupe que de ses propres intérêts stratégiques et économiques. Or, la situation actuelle montre que l’UE a connu des jours meilleurs et qu’elle devrait se concentrer sur l’amélioration de la situation de chacun de ses membres avant d’en intégrer de nouveaux. Pour arriver à ses fins, l’UE joue sur les différentes composantes de la population ukrainienne. Si l’Est du pays est russophone et orthodoxe, l’Ouest est en revanche catholique et très tourné vers la Pologne et le reste de l’Europe. Malgré tout, ces peuples font partie d’une seule et même nation et possèdent la même histoire. La division serait une ineptie.
Mais l’UE a prouvé avec la guerre des Balkans qu’elle n’avait que faire de l’Histoire. Elle ne voit en l’Ukraine que le moyen de reprendre du terrain sur la Russie et déstabiliser la zone frontalière à ces deux dernières. L’immixtion des Etats-Unis dans le différend est riche d’enseignements. Les visites de John McCain et Victoria Nuland (conseillère de John Kerry, Secrétaire d’Etat américain aux affaires étrangères) à Kiev pour soutenir les manifestants montrent l’intérêt que portent également les Etats-Unis à ce conflit. Si certains soutiennent publiquement ces manifestants, on devine le soutien d’autres par des financements privés. Dès lors, on ne peut plus nier la primauté des intérêts politiques et géopolitiques occidentaux sur ceux des ukrainiens. Les américains et les européens s’appuient ainsi sur la tranche de la population pro-européenne pour tenter de renverser le pays et mettre l’Ukraine sur la voie d’une future adhésion à l’Union européenne plutôt que sur celle d’un partenariat renforcé avec le grand frère russe, accueilli par la majorité de la population.
Face à cet imbroglio, il est légitime de se demander où est l’intérêt de l’Ukraine mais n’est cependant pas déraisonnable de constater que la langue, l’histoire et la culture constituent des paramètres importants pour répondre à ce type de problématique. Face à l’ingérence des pays occidentaux, l’avenir de la nation bleue et jaune est incertain…