Le vin est-il en passe de devenir un placement financier comme les actions, obligations ou autres assurances vies ?
C’est en tout cas une tendance qui se développe depuis quelques années. Le mécanisme est simple ; acheter de bonnes bouteilles et attendre qu’elles prennent de la valeur pour les revendre avec parfois une plus-value impressionnante. Mais cette spéculation fait monter les prix et rend certains grands crus totalement inaccessibles aux communs des mortels.
Alors, le vin est-il vraiment un placement financier intéressant ?
Sans se lancer dans des explications d’économistes agréés, il faut savoir que ce qui rend un placement financier intéressant c’est la rareté du produit. C’est la raison pour laquelle il est plus rentable d’investir dans le diamant plutôt que dans la feuille de Bouleau, le premier étant plus difficile à trouver que le second, il se vend plus cher sur le marché.
Il se trouve que pour des raisons historiques, certains vins français ont acquis au fil des siècles une renommée mondiale. Car même si le vin de l’Hexagone n’est peut-être pas aujourd’hui le meilleur du monde en terme de qualité / prix, il n’en demeure pas moins que les grandes Maisons Françaises conservent leurs images d’exceptions, notamment auprès des investisseurs étrangers.
La bulle de spéculation des investisseurs étrangers
Si au début des années 2000 une bouteille de Petrus s’achetait en primeur (directement sortie de la production avec un vieillissement au niveau 0) entre 200 et 300 euros la bouteille, il faut compter investir 1650 euros pour une bouteille primeur 2012.
- Cette différence de prix est le fruit de l’arrivée massive des investisseurs asiatiques et notamment chinois sur le marché du vin français. Ces dix dernières années, l’offre est restée similaire car tous les grands cépages sont des labels contrôlés qui sont impossibles à agrandir, mais par contre la demande n’a fait qu’augmenter. C’est-à-dire que si sur le plateau de Pomerol en Gironde, Petrus continue de produire ces 30 000 bouteilles par an, en Chine les milliardaires achètent les bouteilles par centaines. Lorsqu’on sait que l’Empire du Milieu compte environ 300 milliardaires alors que la France n’en compte qu’une cinquantaine, on se dit que la spéculation va continuer d’augmenter.
Le business des entreprises privées
Très vite certaines entreprises françaises ont compris qu’il y a avait un business à faire, elles ont donc décidé de tout miser sur l’investissement dans le vin. Elles s’appellent Patriwine, Cave Épargne ou la Bergère Investissement et ont décidé de miser sur la rareté de certains millésimes et l’évolution de leur cote suivant l’indice Eurowinedex (la bourse du vin). Depuis 2009, celle-ci est en hausse constante et le cours de certains grands crus notamment bordelais prend entre 15 et 20% par an. Résultat, de plus en plus d’investisseurs se tournent vers ce marché de niche. Notamment ceux qui ont été déçus par la bourse et les banques.
C’est vrai que remplir 40 papiers, et placer 50 plaques sur un compte pour au final repartir avec 750 euros, ça fait beaucoup moins rêver que d’investir dans des caisses de Château Margaux, Château Lafite-Rothschild, Château Latour, Château Mouton-Rothschild, Château Haut-Brion, Château d’Yquem, Château Cheval Blanc, ou encore Château d’Ausone. Car à la grande différence d’un investissement classique, ce qui motive les investisseurs à investir dans le vin, c’est que même si leurs bouteilles perdent de la valeur, ils pourront toujours les boire, ce qui n’est pas désagréable. Alors que si vous avez des actions en masse qui se cassent la tronche vous devez attendre qu’elles remontent ou vendre mais vous ne pourrez jamais les offrir à vos amis lors d’un bon dîner.
Un investissement déconseillé par les spécialistes
Il n’en demeure pas moins que le vin est un marché de niche, et que ce genre d’investissement est réservé aux spécialistes. C’est en tout cas ce que pense Hervé de la tour d’Artaise, président de l’Association française des Conseils en Gestion de Patrimoine Certifié (AFCGP) ; selon lui le marché du vin est très instable, car reposant sur l’investissement massif des investisseurs chinois qui ont créé une sorte de bulle financière notamment avec certaines Maisons bordelaise. Le risque c’est que si dans les années à venir les chinois se retirent du marché alors le prix du vin s’effondrera. Or, beaucoup de grands vins ne sont pas faits pour être consommés tout de suite mais doivent vieillir en cave parfois une quinzaine d’années avant dégustation. Si le marché se casse la tronche, les bouteilles de certains investisseurs propriétaires qui ne seront pas encore arrivés à maturité ne seront donc pas vendables.
Investir dans le vin pour le vendre et non pour le boire : une aberration gastronomique
Avec toutes ces questions économiques pour savoir si le vin est un bon investissement, on en oublierait presque le but premier de ce breuvage, qui est d’être bu. Le problème à l’heure actuelle c’est que la spéculation que font ces investisseurs sur certains grands crus, rend impossible la dégustation pour les amateurs. C’est sûrement la grande critique de la spéculation en général, que se soit pour n’importe quel marché : les vrais amateurs des produits n’ont plus les moyens de se les procurer.
Pensez-vous qu’il soit normal pour un caviste lyonnais de ne plus pouvoir acheter de Mouline de chez Guigal parce que des Pékinois ont décidé qu’il fallait en acheter pour s’en faire des bains ?
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