Et j’ai une bonne raison !
Voilà, c’est dit. Je fais la sourde oreille dans les dîners, je hausse les épaules quand on me demande ce que j’en pense, je détourne les yeux des affiches. Bref, je boycotte Birdman. Et je vous avoue que c’est loin d’être facile vu que c’est le sujet de conversation culturel incontournable de ces dernières semaines après la 87e cérémonie des Oscars qui s’est avérée être relativement intéressante (merci Neil).
Pourquoi tant de haine, me direz-vous ? Détrompez-vous tout de suite, ce film est un chef-d’œuvre, loin de moi l’idée de le nier. Mais dans le combat de David contre Goliath, j’ai toujours eu un faible pour David. Vous êtes en train de deviner le fond de ma pensée. Oui, je m’attendais au sacre de Richard Linklater pour son travail sur Boyhood.
Comparer les deux films est très difficile à mes yeux puisque je considère Boyhood comme un exercice totalement inédit et unique – à l’exception de la trilogie Before Sunrise, Before Sunset et Before Midnight, toujours de l’excellent Linklater, qui nous racontait l’histoire d’un couple avec 9 ans d’intervalle entre chaque film. Il n’est pas vraiment question de considérer Boyhood comme meilleur que Birdman, ce dernier étant, je le répète, un excellent film. Mais le bijou de finesse qu’est Boyhood méritait à mon avis mieux que l’Oscar de la meilleure actrice dans un second rôle pour Patricia Arquette (extraordinaire par ailleurs).
On a déjà beaucoup parlé de ce film et de son concept si particulier et si vous ne l’avez pas déjà vu, courez-y. Si vous avez vécu dans une grotte au cours des quatre ou cinq derniers mois, voici une piqûre de rappel. Le réalisateur, Richard Linklater donc, a tourné pendant douze ans le même film, en organisant des périodes de tournage de trois jours par an, pour élaborer la chronique d’une famille américaine à travers le regard d’un enfant, Mason (excellent et totalement inconnu Ellar Coltrane).
On observe donc les personnages grandir, vieillir littéralement. Mason a 6 ans au début du film, ses parents viennent de divorcer et sa mère se retrouve seule avec sa sœur et lui. Au fil des années, le spectateur le voit mûrir, subir les beaux-pères successifs (et calamiteux), devenir un jeune adulte plein de promesses. Et autour de lui gravitent son père, au début géniteur légèrement irresponsable qui se mue en chef de famille, sa sœur, qu’on a plaisir à observer pendant les années de gloire de Britney Spears, et une galerie de personnages secondaires attachants et terriblement réalistes. On s’amuse également de voir avec quel talent Linklater a su capturer des moments emblématiques de la dernière décennie, la première GameBoy, le premier Mac.
Et on ressort de ce film ravissant en se disant que Richard Linklater nous a offert 166 minutes extraordinaires grâce à un travail de longue haleine que nul autre n’avait envisagé auparavant. Iñárritu est-il moins méritant ? Non, mais on est en droit de regretter qu’un film produit par Fox Searchlight Pictures et donc par 21st Century Fox ait le dessus sur un film indépendant produit par la société du réalisateur. Mais quand on s’intéresse de près à la mécanique des Oscars, l’issue des votes n’est pas si surprenante.
Découvrez Boyhood ici et Birdman là
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